31 - 10 - 2014

Virage réussi pour la Fed, qui évite la panique financière. Source : lesechos.fr

La Fed met fin aux rachats d’actifs qui dopaient les marchés depuis 2008. L’annonce ne provoque pas de perturbations majeures sur les marchés.

C’est ce qui s’appelle un atterrissage en douceur. La Réserve fédérale a confirmé mercredi soir la fin d’un cycle monétaire exceptionnel, sans provoquer de panique majeur sur les marchés. Elle a annoncé qu’elle mettait un terme aux rachats d’actifs (bons du Trésor et titres hypothécaires) qui faisaient toute l’originalité de sa politique depuis six ans. Si virage il y a, on ne peut toutefois pas parler de rupture.

Un bilan record

Et pour cause : la Fed ne compte pas vendre les actifs accumulés depuis 2009. Elle va conserver ses 4.500 milliards de dollars de titres, ce qui limite l’offre sur les marchés et contribue donc à doper les actifs. Son bilan, qui a quintuplé en six ans, n’augmente certes plus, mais il se maintient à un niveau record, jamais observé dans l’histoire des Etats-Unis et d’aucun autre pays. La normalisation n’est certainement pas pour maintenant : la patronne de la Fed, Janet Yellen, a prévenu que le retour à un bilan conforme aux moyennes historiques « pourrait prendre jusqu’à la fin de la décennie ». Elle sait combien les marchés sont fébriles : la semaine du 15 octobre, qui a vu le S&P500 effacer en quelque heures l’intégralité de ses gains 2014, a montré à quel point ils pouvaient chuter rapidement.

Une communication bien exécutée

La manière dont la Fed a négocié ce premier virage n’en représente pas moins un modèle de transparence et d’anticipation. Elle a pris le parti d’un sevrage progressif, étalé sur pratiquement un an. En réduisant ses achats de 10 milliards chaque mois, elle a dessiné une trajectoire qui menait logiquement à une extinction totale, ce mois-ci. Nul ne pourra donc dire qu’il a été pris par surprise. « Le protocole de sortie était tellement bien documenté que les investisseurs l’avaient déjà intégré à leurs prix », confirme Barbara Cummings, gérante pour la Boston Private Bank & Trust Company.

La Réserve fédérale américaine n’a pas toujours brillé par sa transparence et ses talents de communication. En relevant brutalement les taux d’intérêt en 1994, Alan Greenspan avait pris tous les investisseurs de cours, provoquant un krach obligataire et une grave dévaluation monétaire au Mexique – la fameuse crise « Tequila ». Ben Bernanke avait également créé la panique, à l’été 2013, en évoquant pour la première fois, et sans préavis, une réduction des rachats d’actifs. Les marchés émergents en avaient payé le prix pendant des semaines.

En mettant un point final aux rachats d’actifs, Janet Yellen termine le travail que son prédécesseur Ben Bernanke avait amorcé en fin d’année dernière. « La feuille de route était déjà tracée. Elle n’a fait que l’exécuter », explique un analyste de Goldman Sachs. Ses propres défis sont devant elle. Janet Yellen doit en effet préparer le coup d’après, à savoir la hausse des taux d’intérêt, restés proches de zéro depuis 2008.

La politique de taux bas prolongée

Rien, dans le communiqué de mercredi, ne laissait penser qu’un durcissement soit imminent. Comme à son habitude, Janet Yellen a martelé qu’il s’écoulerait une « période considérable » entre la fin des rachats d’actifs et le relèvement des taux directeurs. Un message rassurant qui renforce l’hypothèse de voir la Réserve fédérale prolonger d’au moins six mois supplémentaires sa politique monétaire ultra-favorable. Le communiqué publié mercredi était néanmoins légèrement plus « faucon » que les précédents : alors que la faible participation au marché du travail représentait une préoccupation permanente, la FED a noté pour la première fois que cette « sous-utilisation des actifs était en train de diminuer ». Si la tendance se confirme, la Réserve fédérale sera certainement tenté d’amorcer un relèvement des taux dès la fin du printemps 2015.