Notre palmarès exclusif met en lumière d’importants gains pour certaines entités. Des bonus qui s’accompagnent d’économies de fonctionnement.
Les communes nouvelles ressemblent à « L’Ecole des fans » : au bout du processus, tout le monde gagne. Mais certaines plus que d’autres. Avec la start-up Simco (lire ci-contre), « La Gazette » dévoile le palmarès des gains de dotation globale de fonctionnement (DGF) des 25 communes nouvelles créées entre 2012 et le 1er janvier 2015.
Considérant le total des gains réalisés depuis la mise en place de la commune nouvelle, les plus anciennes sont naturellement les plus gagnantes. Ainsi, depuis sa création en 2012, Dévoluy a totalisé 713 000 euros supplémentaires. Toutefois, en termes de gain par habitant et par an, c’est Villeneuve-en-Perseigne qui sort du lot avec 91 euros dès la première année de création…
Même si les communes nouvelles avaient fait leurs prévisions, certaines ont été surprises du montant supplémentaire perçu : « Si nous avions bien anticipé notre DGF calculée sur le nombre d’habitants, nous avions sous-estimé celle liée à nos investissements, qui sont restés au même rythme malgré le contexte actuel », note Philippe Chalopin, maire de Baugé-en-Anjou (6 300 hab., Maine-et-Loire).
Cette manne a ainsi amorcé un cercle vertueux : un autofinancement qui passe de 1,5 à 2 millions d’euros par an, de meilleures conditions d’endettement, des contrats plus avantageux, des subventions mieux captées et la fin de l’écrêtement des droits de mutation à titre onéreux compte tenu de la taille de la commune nouvelle.
L’exercice a pourtant ses limites. « Cette DGF est surtout une compensation des hausses sur les frais généraux et les charges de personnel », assure Jacqueline Puget, maire de Dévoluy (1 000 hab., Hautes-Alpes), qui a vu ses effectifs doubler après l’intégration du personnel de l’interco dans la commune nouvelle, aux meilleures conditions statutaires.
Si l’investissement peut être une stratégie gagnante, les communes nouvelles constituées sur le périmètre de leur intercommunalité peuvent, par le biais d’incitations financières prévues dans la loi Pélissard du 16 mars 2015, maximiser leur gain de DGF. Beaugé-en-Anjou en attend ainsi près d’un million d’euros sur trois ans.
De son côté, Villeneuve-en-Perseigne (2 200 hab., Sarthe), issue d’une communauté de communes, a choisi la commune nouvelle pour « écarter la fusion avec une autre intercommunalité bien moins intégrée qui aurait entraîné une perte de DGF », explique le maire, André Trottet, qui a pu éviter de recourir au levier fiscal en 2015 malgré un programme d’investissement sur deux ans « qui n’aurait pas vu le jour sans la commune nouvelle ».
« On peut même faire mieux en constituant une intercommunalité regroupant des communes nouvelles calquées elles-mêmes sur leur interco », s’amuse Vincent Aubelle, professeur à l’université Paris est – Marne-la-Vallée(1). « Mais la question des économies est plus profonde que ces gains purement conjoncturels », nuance-t-il.
Grâce à ce ballon d’oxygène opportun, les communes nouvelles peuvent rationaliser leurs dépenses plus facilement et à moindre coût que dans le cadre d’une intercommunalité : « Il n’y a pas de coûts masqués liés à la complexité de la construction qui met en jeu deux entités, la commune et l’interco », analyse Vincent Aubelle. « Nous étions arrivés à un stade où nous ne pouvions plus augmenter notre niveau de service, ni transférer de compétence sans mettre notre interco dans le rouge », confirme Philippe Chalopin.
L’intercommunalité financièrement ringardisée par la commune nouvelle ? « Pas du tout ! s’insurge Vincent Aubelle. Il ne faut pas suivre la logique intégrative encouragée par la course à la DGF qui a un côté infantilisant, mais réfléchir à la façon dont l’interco peut devenir stratège et organe péréquateur d’un territoire. » C’est d’autant plus vrai que la carotte financière mise en place pour encourager la constitution de communes nouvelles existe sous enveloppe constante. Conséquence, les communes qui s’engagent aujourd’hui gagneront ce que les autres perdront.