La Bourse chinoise qui replonge , le dollar qui chauffe et les matières premières en pleine dégringolade : l’économie mondiale reste trop fragile pour que les Etats-Unis prennent le risque de précipiter leurs décisions monétaires. La Réserve fédérale, qui achevait mercredi son comité de politique monétaire, a refusé de dire si elle allait, oui ou non, relever les taux d’intérêt en septembre, comme la plupart des économistes l’anticipent.
Comme à la mi-juillet, elle a sous-entendu qu’il serait certainement « approprié » de déclencher une première hausse des taux d’intérêt avant la fin de l’année – un virage qui menace de déstabiliser l’ensemble des pays émergents. Elle attend que les feux de l’économie américaine passent tous au vert (chômage, inflation, salaires, productivité, etc …) pour engager ce virage.
A défaut d’obtenir un calendrier précis de la Fed, les marchés en sont donc réduits à décortiquer tous les indicateurs conjoncturels publiés ces jours-ci par l’administration Obama. La croissance du deuxième trimestre, qui fera l’objet d’une première estimation ce jeudi, est particulièrement attendue. Une hausse du PIB supérieure à 2,5 % (en rythme annuel) renforcerait l’hypothèse d’un virage monétaire en septembre. Un chiffre franchement inférieur accroîtrait les chances de voir cette échéance reportée au mois de décembre – date de la prochaine conférence de presse de Janet Yellen. Au-delà de la croissance, la Fed veut aussi s’assurer que le plein-emploi est à portée de main et être « raisonnablement confiante » dans le fait que l’inflation se rapproche de son objectif de 2 % annuel.
Le taux de chômage américain a encore baissé en juin (5,3 %), au plus bas depuis avril 2008. Mais les prix à la consommation progressent beaucoup moins vite que le souhaite la Fed (+ 0,2 % sur un an en mai). Le dollar, qui a retrouvé son plus haut niveau depuis trois mois, n’arrange pas les choses, puisqu’il réduit le coût des produits importés. Le prix des matières premières (cuivre, or, pétrole, etc.) vient d’atteindre un plus bas depuis treize ans, selon l’indice Bloomberg, accentuant la pression déflationniste.
La patience de Janet Yellen a toutefois ses limites. Elle estime qu’il y a urgence à relever les taux d’intérêt américains – proches de zéro depuis 2008 – sous peine de favoriser l’émergence de « bulles » boursières. « Je suis prêt à miser beaucoup sur une hausse des taux en septembre. La Fed est désormais très impatiente de normaliser sa politique monétaire », croit savoir Stephen Stanley, chef économiste à Amherst Pierpont Securities. « Janet Yellen l’a dit il y a quelques semaines : pour que la hausse des taux soit progressive, il faut qu’elle soit amorcée au plus vite », ajoute-t-il. La première hausse des taux ne mérite d’ailleurs pas tant d’attention, puisqu’elle sera minimale (certainement quelques dixièmes de point), a fait valoir Janet Yellen mi-juillet. « La politique monétaire va rester extrêmement accommodante pendant un certain temps », a-t-elle ajouté.