14 - 01 - 2015

La BNS persiste à acheter de l’euro, pour combien de temps ? Source : bourse.lesechos.fr

La Banque nationale suisse (BNS) a massivement acheté des euros afin d’enrayer l’appréciation de sa devise mais au rythme où la devise européenne se déprécie, rien ne dit que ses achats vont durer.

L’appétit de la BNS pour l’euro contraste avec la diminution de la part de la monnaie unique européenne dans les réserves de change des autres grandes banques centrales au cours des derniers mois.

De fait, la part de l’euro dans les réserves de change des grandes banques centrales est tombée à un plus bas de dix ans au troisième trimestre 2014, selon les dernières données publiées par le Fonds monétaire international.

Les réserves de change de la Suisse ont atteint un plus haut record le mois dernier après l’intervention d’un montant estimé à 20 milliards d’euros de la BNS sur le marché des changes, après deux ans d’absence, pour défendre le plancher de 1,20 franc suisse pour un euro en vigueur depuis plus de trois ans.

« Beaucoup dépend des montants qu’ils accumulent et de la rapidité avec laquelle ils achètent des euros », a dit Jonathan Webb, responsable de la stratégie sur les changes chez Jefferies.

« Si à court terme ils vont plutôt conserver le gros de leurs réserves en euros juste pour éviter qu’il ne s’affaiblisse plus encore, sur la durée je m’attendrais à ce qu’ils vendent des euros et en diminuent la part (dans leurs réserves de change). »

De nombreux gestionnaires de réserves de change se sont détournés de l’euro depuis que la Banque centrale européenne (BCE) a opté pour un taux de dépôt négatif en juin dernier, pénalisant le coût de détention d’euros dans ses livres.

L’euro à par ailleurs perdu plus de 14% de sa valeur au cours des six derniers mois face au dollar, tombant à un plus bas de neuf ans contre la devise américaine la semaine dernière à 1,1754 dollar.

La hausse des réserves de change de la Suisse contraste aussi avec le recul des réserves toutes banques centrales confondues enregistré depuis l’accélération de la hausse du dollar à partir du mois de juillet avec les anticipations d’une remontée des taux directeurs de la Réserve fédérale dans le courant de cette année. Certaines banques centrales, comme celle de la Russie ou du Nigeria, ont par ailleurs dû puiser dans leurs réserves pour contrer la dépréciation de leur devise et la fuite des capitaux.

STERLING ET DOLLAR CANADIEN, GAGNANTS D’UNE DIVERSIFICATION

La BNS détient près de 45% de ses réserves de change en euros, contre 57% en 2011. Le dollar en représente environ 30%, la livre sterling 7%, le yen 9% et le dollar canadien 4%.

Pour Michael Sneyd, analyste sur les changes chez BNP Paribas, la livre sterling, le dollar canadien de même que des devises moins liquides comme le won coréen ou le dollar de Singapour pourraient bénéficier d’une diversification par la BNS de ses réserves de devises.

A la fin décembre, la banque centrale détenait l’équivalent de 495,104 milliards de francs suisses (412,33 milliards d’euros) en devises contre 462,669 milliards un mois auparavant.

La hausse de décembre est la plus importante enregistrée depuis le paroxysme de la crise des dettes souveraines de la zone euro à la mi-2012. Elle reflète l’intervention de la BNS sur le marché des changes le mois dernier lié à la forte chute du rouble et au rôle de valeur refuge joué alors par la devise suisse. La BNS avait aussi imposé des taux négatifs sur les dépôts dans ses livres afin d’enrayer les afflux de capitaux en Suisse.

Alors que le franc suisse se rapproche du seuil de 1,20 pour un euro, la BNS continue d’intervenir et il est même attendu qu’elle accentue ses interventions. Les anticipations de nouvelles actions vont se renforcer si la BCE annonce comme attendu dès la semaine prochaine un programme d’achat de dettes souveraines de la zone euro qui aura pour effet d’affaiblir un peu plus la devise européenne.

Pour Marc Chandler, responsable de la stratégie sur les changes chez Brown Brothers Harriman, la BNS est dans l’immédiat le seul acheteur majeur d’euro alors que tous les autres investisseurs à long terme réduisent leur exposition sur la monnaie européenne.