C’est la rechute pour l’hôpital. Comme anticipé à la fin de l’année, le déficit des établissements publics a plongé en 2017. Mais au lieu de tripler , comme le redoutait alors la Fédération hospitalière de France (FHF), il a doublé, à 890 millions d’euros. Juste en dessous du seuil du milliard d’euros, jamais franchi. « C’est la plus forte variation qu’on ait connue, avec un déficit inédit que personne n’avait anticipé, et qui fragilise les établissements », s’émeut Frédéric Valletoux, président de la Fédération.
Pour limiter le dérapage, le gouvernement a débloqué en mars 250 millions d’euros de crédits à effet rétroactif sur les comptes 2017, dont 180 millions ont été utilisés dans les établissements publics. Sans cette opération, le déficit se serait élevé à 1,070 milliard d’euros.
Cela n’est pas la seule mauvaise nouvelle. Les investissements sont restés en berne. Les hôpitaux ont investi moins de 4 milliards l’an dernier, alors qu’entre 2008 et 2011 les montants dépassaient 6 milliards d’euros par an. Leur capacité d’autofinancement n’a cessé de chuter, car la hausse des budgets santé s’est contractée pour redresser les comptes de la Sécurité sociale. Par un effet de vases communicants, l’Assurance-maladie se relève , mais les hôpitaux s’enfoncent.
Les vases communicants, la FHF en a assez, justement. « Depuis deux ans, les hôpitaux servent de variable d’ajustement du système de santé parce que l’Assurance-maladie ne parvient pas à contenir les enveloppes de soins de ville », accuse Frédéric Valletoux. En 2017, les professionnels qui ne sont pas à l’hôpital ont dépensé 600 millions de plus que l’objectif initial voté fin 2016. C’est exactement le montant que n’ont pas consommé les établissements hospitaliers.
Pourquoi cet argent n’a-t-il pas été dépensé ? En grande partie en raison du ralentissement de l’activité hospitalière. Comme les établissements se financent en fonction de leur volume d’actes, quand il y a moins de patients, les revenus chutent. D’autant plus que chaque année, le gouvernement rogne sur les tarifs des soins (-1,6 % en 2017) pour compenser l’augmentation prévue de la fréquentation. La baisse de régime inattendue de 2017 a coûté 385 millions d’euros aux hôpitaux.
L’effet de ciseaux a été violent. Du côté des recettes, l’activité en nombre de séjours a très peu augmenté, de 0,4 % en volume et de 0,2 % en valeur, contre respectivement +2,3 % et +1,5 % en 2016. En regard, les dépenses de personnel ont continué à croître de 2,2 %. Les mesures prises par le gouvernement précédent (revalorisation du point d’indice et révision des grilles de la fonction publique) ont représenté 1,9 point de cette hausse. A cela, il faut ajouter les augmentations mécaniques de salaires liées à l’âge et à l’expérience. Enfin, le coût des médicaments innovants a continué de dériver (+12 %).
« Nous tenons nos dépenses mais nous sommes pénalisés », soupire Frédéric Valletoux, en rappelant que, en mai, l’administration a donné instruction aux hôpitaux de diminuer de 1,2 milliard d’euros la masse salariale hospitalière sur cinq ans. La FHF, qui réclame depuis longtemps plus d’autonomie pour s’adapter aux nouvelles contraintes budgétaires, place ses espoirs dans le plan de transformation du système de santé du gouvernement : « Nous avons besoin d’audace et de volontarisme, tout de suite, parce que si on attend la mise en oeuvre et l’évaluation des expérimentations de financement promises en 2017, les hôpitaux ont le temps de dépérir », prophétise Frédéric Valletoux.