Il y a de l’électricité dans l’air à l’approche de la publication, lundi, de l’avis de Bruxelles sur le projet de budget de la France. Dans la dernière ligne droite, Berlin a décidé de hausser le ton par la voix de son commissaire à l’Economie numérique, Günther Oettinger. Passablement irrité de voir la France repousser encore de deux ans son objectif de retour du déficit à 3 % de PIB, « nous perdrions toute crédibilité si nous prolongions pour la troisième fois le délai accordé sans exiger des contreparties très concrètes et précises », prévient-il dans une tribune publiée par « Les Echos ». Et d’exhorter la Commission de traiter avec « rigueur » la France « en tant que pays déficitaire récidiviste ».
Embarrassée par le report à 2017 de l’objectif des 3 %, la Commission s’apprête à demander à la France de faire plus d’économies pour crédibiliser cet objectif et éviter un nouveau dérapage. A Berlin, on rappelle aussi qu’une procédure de sanction peut être engagée si la Commission arrive à la conclusion que la France ne fait pas assez d’efforts et n’a pas pris les mesures appropriées. Une menace balayée d’un revers de main jeudi par Michel Sapin, jugeant la question d’éventuelles amendes « sans intérêt et sans consistance ». « Chacun ne doit pas se prendre pour une pervenche […], équipée de carnets à souches », a réagi le ministre des Finances. « Sanctionner, c’est toujours un échec », avait déclaré, la semaine dernière, le nouveau commissaire aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, semblant écarter l’hypothèse d’une sanction.
C’est dans ce contexte que Michel Sapin se rend vendredi à Lisbonne et à Madrid pour rencontrer ses homologues portugais et espagnol. Deux pays qui, eux, ont concédé de très lourds sacrifices au cours des dernières années. « L’exemple de l’Espagne montre que la politique d’austérité fonctionne », juge le ministre espagnol des Finances, Cristobal Montoro. Décidé à défendre ses choix budgétaires, Michel Sapin compte, plus globalement, expliquer la position de la France en faveur d’une relance économique de la zone euro. « La situation de trop faible croissance et de trop faible inflation dans la zone euro nécessite d’ouvrir un large débat avec nos partenaires européens, plaide-t-on dans l’entourage du ministre. Il y a urgence à agir en utilisant tous les leviers possibles pour ne pas que cette situation s’installe dans la durée. » Le ministre a également prévu de se rendre à Berlin et à Rome d’ici au Conseil européen des chefs d’Etat des 18 et 19 décembre où sera notamment discuté le plan Juncker sur l’investissement en Europe.