La création par l’Etat en 2014 d’un fonds de soutien doté de 3 milliards d’euros destiné à aider les collectivités à se défaire de leurs emprunts structurés à risques a permis d’améliorer leur santé financière: tel est le message qu’a martelé le gouvernement lors de la conférence de presse du 22 mars dernier qui faisait le point sur les quelque 10 milliards d’emprunts toxiques contractés par ces collectivités.
Trois ans après la mise en place du fonds, l’Etat a engagé 2,6 milliards d’euros auprès de 578 collectivités bénéficiaires: les communes ont touché l’essentiel de cette manne (858 millions pour les communes de plus de 10 000 habitants, 345 pour celles en-dessous), le reste allant aux EPCI, syndicats, OPH et d’autres collectivités. Une manne qui leur a permis de se remettre sur pied, à l’instar de Sangatte (Pas-de-Calais, 4700 hab.). Jusqu’en 2013, cette commune qui jouxte Calais ne pouvait plus investir, tout l’argent passant dans les remboursements. Mais grâce au fonds qui a ramené le taux de son emprunt à 3,21% payable en 33 annuités, Sangatte a retrouvé des marges de manoeuvre. “Ca permet d’envisager l’avenir plus sereinement” souligne son maire Guy Allemand (sans étiquette).
Comme d’autres collectivités, Sangatte avait souscrit des prêts structurés à taux variable avec des mensualités de remboursement moins importantes au départ, mais beaucoup plus risqués que les prêts à taux fixes ou variables classiques. Ces prêts toxiques avaient en effet pour particularité d’être indexés sur des valeurs et indices qui se sont révélés très volatiles dans le contexte de crise financière, entraînant une augmentation exponentielle des taux d’intérêt à régler. “Il faut se méfier des propositions mirobolantes surtout quand elles viennent des banquiers” ironisait Jean-Michel Baylet ministre de l’Aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.
Parce que dans cette affaire les collectivités ont emprunté imprudemment, que les banques prêteuses n’ont pas suffisamment éclairé leurs clients sur les risques et que l’Etat a manqué à son devoir de contrôle, le gouvernement a imposé une responsabilité partagée pour régler le dossier. Ainsi les banques financent-elles plus de la moitié du fonds de soutien, tandis que les aides accordées aux communes sont plafonnées à 75 % du montant des Indemnités de Remboursement Anticipé (IRA) qu’elles doivent régler aux banques pour convertir leur emprunt toxique en emprunt raisonnable.
Au volet curatif le gouvernement a ajouté un volet préventif. Tirant les leçons du passé, l’Etat a renforcé la règlementation bancaire et comptable applicable aux prêts des collectivités locales. Deux nouvelles instances complètent ce dispositif: un service à compétence nationale accompagne désormais sur ce sujet des prêts les élus locaux en lien avec les services déconcentrés de l’Etat et les représentants du secteur bancaire.
De son côté, le Conseil national d’orientation et de suivi (CNOS) composé de représentants de l’Etat et d’élus désignés par les associations nationales d’élus locaux détermine la doctrine d’emploi des aides accordées: chaque collectivité éligible a pu ainsi connaître à l’avance la part de l’IRA que l’Etat pourrait prendre à sa charge grâce à un simulateur mis en ligne en avril 2015.
Une fois les propositions reçues, les collectivités disposaient d’un délai de trois mois pour finaliser la transaction avec la banque prêteuse (qui éteignait tout contentieux en cours) et signer un nouvel accord de remboursement du prêt concerné. Sur la base des conditions financières de remboursement stipulées dans cet accord, le fonds de soutien procédait au calcul du montant de l’aide définitivement attribuée.
Moins de 5% des communes éligibles au fonds ont cependant préféré jouer cavalier seul en contestant devant les tribunaux la légalité de ces emprunts. Mais tant en première instance qu’en appel elles ont été déboutées ou ont obtenu des conditions moins avantageuses, les juges considérant qu’elles étaient pour une grande part responsables de ce qui leur était advenu rappelait Christian Ecker, secrétaire d’État chargé du Budget et des Comptes publics.