Écrit par nos soins et à retrouver dans Finances Hospitalières – édition septembre 2022. L’année 2022 marque pour l’instant un tournant avec une hausse très significative des taux longs et la fin de l’ère des taux négatifs.
Les conséquences sont importantes pour le financement des projets hospitaliers par emprunt, cette hausse s’accompagnant de contraintes nouvelles comme le taux d’usure : les comportements des emprunteurs doivent donc s’adapter.
1. Jusqu’où va aller la hausse des taux pour contrecarrer une inflation hors de contrôle ? :
Du 27 au 29 juin les grands argentiers Jay Powell, Christine Lagarde et Andrew Bailey, respectivement à la tête de la Réserve fédérale des Etats-Unis, la Fed, de la BCE et de la Banque d’Angleterre, se sont retrouvés et l’ont chacun dit à leur manière : ils feront tout pour enrayer l’inflation, quitte à flirter avec une récession si cela s’avérait nécessaire avec un difficile équilibre à trouver.
Ils augmenteront les taux d’intérêt afin de réduire la demande. Jay Powell accepte que « beaucoup de douleur » économique pourrait être nécessaire. Christine Lagarde avertit que le resserrement aura lieu même en cas « d’une perte plus permanente du potentiel économique, limitant la disponibilité en ressources ». En clair, même si la Russie coupait le gaz, le resserrement monétaire continuerait. Ceci s’est vérifié factuellement avec 75 pbs de hausse en juillet des taux aux USA et 50 pbs en Europe (contre 25 pbs prévu).
Ces propos venaient clôturer un mois de juin 2022 qui a marqué un tournant majeur dans la politique monétaire mondiale. Le monde occidental, qui se débattait avec la désinflation il y a moins de deux ans, est désormais bel et bien sorti des taux d’intérêt négatifs. Les niveaux d’inflation de juin sont à des taux inexplorés depuis des décennies : 9,1% aux USA, 9,4% en Angleterre, 8,6% en zone Euro, 8,2% en Allemagne, 5,8% en France, etc…Le niveau en France est plus mesuré que dans les autres pays, notamment grâce aux mesures prises sur l’énergie. Léger mieux aux USA en juillet avec un taux de 8,5%, mais cela ne présume de rien à ce stade….En Europe, en juillet la hausse continue : 6,1% en France, 8,5% en Allemagne, 8,9% en zone Euro.
Le 21 juillet 2022, la Banque centrale européenne (BCE) a donc relevé ses taux d’intérêt pour la première fois en 11 ans afin de juguler une inflation record, emboîtant ainsi le pas à des dizaines d’instituts d’émission alors même que l’économie de la zone euro subit les conséquences de la guerre en Ukraine. La BCE a mis fin à l’ère des taux négatifs en relevant son taux de dépôt de 50 points de base, le ramenant à zéro, alors qu’elle avait annoncé à l’issue de sa réunion de juin qu’elle procéderait à une hausse de taux de 25 points de base seulement.
Le taux d’intérêt des opérations principales de refinancement ainsi que celui de la facilité de prêt marginal sont également relevés d’un demi-point, à 0,5% et 0,75% respectivement. Effet immédiat de ce relèvement le 22/07 : désormais tous les taux court terme de l’Ester à l’Euribor 12 mois sont en territoire positif, l’OAT10 ans était ce jour là à 1,65% en baisse de 15 pbs par rapport à la veille, restant également en-dessous de ses plus hauts mi-juin à 2,40%.
« Une nouvelle normalisation des taux d’intérêt sera appropriée », a déclaré la BCE dans un communiqué, ajoutant que la sortie des taux négatifs « permet au Conseil des gouverneurs d’effectuer une transition vers une approche réunion par réunion sur les taux ». Des sources proches des débats au Conseil des gouverneurs avaient indiqué qu’une augmentation des taux d’un demi-point était envisagée face à la dégradation des perspectives d’inflation suggérée par de récents indicateurs. L’inflation, déjà proche d’un taux à deux chiffres, risque désormais de s’ancrer au-delà de l’objectif de 2% fixé par la BCE et une pénurie de gaz cet hiver risque de pousser les prix encore plus haut.
La BCE a également accepté d’apporter une nouvelle aide aux pays les plus endettés de l’Union en approuvant un nouveau programme d’achat de titres (Transmission Protection Mechanism, TPM), destiné à limiter la hausse de leurs coûts d’emprunt et à limiter la fragmentation financière. « L’ampleur des achats dans le cadre du TPI dépend de la gravité des risques auxquels est confrontée la transmission de la politique monétaire », a indiqué la banque. « Le TPI veillera à ce que l’orientation de la politique monétaire soit transmise de manière fluide dans tous les pays de la zone euro. » Cet engagement intervient alors que l’Italie fait face à une crise politique après la démission du président du Conseil, Mario Draghi qui pourrait entraîner la zone Euro dans des contrées inexplorées, l’Italie étant un risque systémique beaucoup plus important que la Grèce….. Alors un retour à la crise de 2012 est-il imminent ? La remontée des taux fera-t-elle dérailler les finances publiques? Il faudrait que les taux d’intérêt augmentent très fortement et durablement pour qu’on commence à observer des problèmes de solvabilité car les obligations de l’Italie ont une durée moyenne de plus de sept ans, ce qui fait que la hausse des taux mettra du temps avant de se répercuter sur le coût de la dette. Mais c’est la pression sur l’Italie qui a convaincu la BCE de mettre en place » un dispositif visant à éviter le dérapage des spreads des pays les plus fragiles afin de contrer la spéculation et empêcher le retour de la crise de la dette qui a secoué la zone euro en 2012. L’Italie est perçue comme le pays le plus vulnérable, et c’est donc celui contre lequel on spécule.
Face aux prix qui ne cessent de grimper aux Etats-Unis, la Fed a annoncé le 27 juillet une nouvelle forte hausse des taux directeurs de 0,75 point. Il s’agit du quatrième relèvement depuis mars : 0,25 point en mars, 0,5 point en mai, et 0,75 point en juin. Cette fois, la hausse porte les taux directeurs entre 2,25 et 2,50 %. Le « comité monétaire anticipe que de nouvelles hausses des taux directeurs seront appropriées », a commenté la Fed dans un communiqué. « Les récents indicateurs de dépenses et de production ont ralenti », assure la Fed, évoquant la consommation américaine, locomotive de l’économie américaine, qui compte pour près des trois quarts du PIB. « Cependant, les créations d’emploi sont restées robustes ces derniers mois, et le taux de chômage est toujours bas », a-t-elle ajouté. Une nouvelle hausse des taux « inhabituellement élevée » pourrait être nécessaire lors de la prochaine réunion de la Fed, en septembre, a averti son président, Jerome Powell, lors d’une conférence de presse. L’inflation est « beaucoup trop élevée », et le marché du travail « extrêmement tendu », a-t-il mis en avant. Il a cependant précisé que la décision de septembre « dépendra des données publiées d’ici là ».
La Fed a déclaré qu’il faudrait une baisse de l’inflation pour qu’elle envisage de cesser de relever ses taux, ou du moins de ralentir le rythme des hausses. Le ralentissement économique tant attendu pour faire baisser les prix pourrait toutefois s’avérer trop fort, et faire plonger la première économie du monde dans la récession. Et le 28/07, justement, le produit intérieur brut (PIB) des États-Unis s’est de nouveau contracté au deuxième trimestre, ce qui accroît les risques de voir la première économie du monde plonger dans la récession. La contraction du PIB est de 0,9% en rythme annualisé : une faible croissance était attendue, après un recul, au premier trimestre déjà, de 1,6%
L’équation est donc complexe et indécise pour les banques centrales : augmenter les taux pour contrer l’inflation est une priorité à long terme car les économies souffriraient trop d’une inflation forte pendant plusieurs années, macro-économiquement la priorité est celle-là ; mais il faut également prendre en compte le risque de récession qui serait malvenue et trop rapide après celle connue pendant le Covid. Ajoutons à cela qu’une augmentation des taux pourrait causer des problèmes budgétaires aux économies des pays déjà très endettés……et que le contexte géopolitique tendu (guerre en Ukraine, USA-Chine avec Taiwan) augmente l’incertitude des mois à venir avec des pays impliqués qui jouent un rôle majeur dans la chaine d’approvisionnement mondiale et donc le coût des matières premières.
En conclusion, une politique monétaire plus stricte aura inévitablement des coûts économiques, mais tout retard ne fera que les exacerber et les banques centrales doivent donc prendre leurs décisions tout en essayant de parvenir à un atterrissage en douceur des économies.
2. Quelles conséquences sur les prêts proposés aux Etablissements de Santé :
Une évolution inédite depuis des années des taux courts et longs :
Lors de notre dernier article en avril 2022, l’OAT 10 ans cotait au 15 avril à 1,33 % au plus haut depuis août 2014. Depuis, sa valeur a atteint un pic à 2,40% le 16 juin 2022 (0,16% le 16 juin 2021), un plus haut depuis fin 2013. Désormais l’OAT 10 ans est plutôt en baisse continue avec un taux à 1,70% le 18/08/2022 (plus bas à 1,25% le 02/08/2022) avec de fortes volatilités intraday, le marché n’est pas stabilisé loin s’en faut avec les incertitudes nombreuses sur l’évolution de l’inflation et de la croissance dans la durée dans une partie d’équilibriste, qui ne permettent pas aux investisseurs d’avoir une vision précise des hausses de taux (et de leur rythme) à venir des banques centrales. Cette forte baisse de environ 70 points de base depuis 2 mois ne doit pas encore être considérée comme une embellie à long terme.
Malgré le ralentissement de la conjoncture économique, on peut anticiper un nouveau relèvement des taux par la BCE de 50 pbs en septembre, puis de 25 pbs en octobre et en décembre. Si la zone euro échappe à la récession cet hiver, il est possible que la BCE relève encore ses taux en 2023. Toutefois, si le risque de récession s’accentue, la BCE devrait marquer une pause en décembre.
Côté des taux courts, l’Euribor 12 mois cote le 18/08 1,118% en hausse vertigineuse (-0,493% il y un an), le 6 mois est à 0,735% le 18/08 (0,503% il y a un mois) ; le 3 mois est positif depuis mi-juillet à 0,333% le 18/08, le 1 mois est anticipé positif très prochainement tout comme l’Ester.
Donc actuellement, de manière très concrète, regardons un Etablissement de Santé (EPS) qui possède dans son encours un prêt pour 5 M€ sur Euribor 12 mois non flooré avec une marge de 1% dont la prochaine échéance est au 1er juillet 2023 : le taux payé sera de 0,96% (Euribor 12 mois du 1er juillet 2022) + la marge, alors que l’échéance du 1er juillet 2022 a eu un taux payé de -0,485% + la marge. Soit un montant de frais financiers quasiment multiplié par 4 entre 2022 et 2023!!! (26 K€ de frais financiers en 2022 et 98 K€ en 2023).
Malheureusement, côté Livret A, la tendance est la même : au mois de février 2022, une première hausse de 0,50% a eu lieu et le taux du Livret A est passé de 0,50% à 1,00%. Au 01/08/2022 (date de révision du Livret A) une seconde hausse a eu lieu avec un taux du Livret A porté à 2%, ce qui est logique les composantes du calcul du Livret A étant l’inflation et les taux courts. Très concrètement également : un EPS détenant un encours de 5 M€ en Livret A + une marge de 1% va donc subir une augmentation de ses frais financiers en année pleine de 75 K€, avec un doublement (75 K€ au 1er janvier 2022 contre 150 K€ désormais). Vigilance également sur les contrats à double révisibilité : la hausse du taux induit une hausse de la charge financière et donc une diminution du remboursement de capital. Le capital s’amortit moins rapidement et augmente ainsi le coût du financement et l’évolution de l’encours de la dette.
La gestion du taux d’usure :
La Banque de France fixe les taux de l’usure à partir des taux effectifs moyens pratiqués par les banques et des établissements de crédit augmentés d’un tiers. Les seuils de l’usure sont publiés au Journal officiel à la fin de chaque trimestre pour le trimestre suivant. La brutale hausse des taux au cours des derniers mois fait donc apparaitre une certaine décorrélation entre le taux d’usure définit par la banque de France et les taux effectif moyen du trimestre précédent. La principale problématique est que la méthode de calcul des taux d’usure n’est pas adaptée à une telle rapidité de remontée des taux. Il est à préciser que le taux d’usure concerne uniquement les établissements de crédits et les sociétés de financement.
La problématique principale était donc que le taux d’usure était défini pour une durée supérieure à 2 ans, ce qui a empêché à partir du mois d’avril les établissements de crédit de faire des propositions en taux fixe en réponse aux consultations (hors banques régionales avec de fortes disparités régionales) sur des durées de 15-20 ans car le niveau de taux hors marge bancaire était souvent déjà au-dessus du taux d’usure !!!
Le taux d’usure applicable au 1er juillet 2022 pour une période de 3 mois était donc très attendu. Au-delà de l’actualisation, le principal changement concerne la corrélation avec les taux de marché. Ainsi le taux de l’usure sur les prêts à taux fixe pour les collectivités/EPS est maintenant découpé en fonction de la maturité.
Avant cette modification, tous les prêts à taux fixe d’une durée supérieure à 2 ans avaient le même taux de l’usure. A compter du 1er juillet 2022 le niveau du taux de l’usure pour les contrats à taux fixe a été découpé en fonction des durées suivantes :
- Entre 2 et 10 ans : 2.75%,
- Entre 10 et 20 ans : 2.83% (taux fixe sur 10 ans hors marge à 1,84% ce jour),
- 20 ans et plus : 3.03% (taux fixe sur 20 ans hors marge à 2,17% ce jour),
Pour les prêts à taux variable d’une durée supérieure à 2 ans, le taux de l’usure est à 2,56%.
Pour rappel, au 2ème trimestre 2022, le taux de l’usure sur les prêts d’une durée supérieure à 2 ans était de :
- 1.76% pour les contrats à taux fixe
- 1.53% pour les prêts à taux variable
Les propositions faites actuellement aux Etablissements Publics de Santé :
Un taux fixe 20 ans cote au 18 août 2022 à 1,92% hors marge bancaire. Donc la problématique du taux de l’usure à ce niveau de taux est moins marquée mais pas totalement absente selon les profils de risque : les banques peuvent appliquer une marge maximum de 1,11%.
Cependant les banques continuent bien entendu d’adapter les marges proposées au profil de risque de l’emprunteur, et il demeure des situations problématiques où le taux fixe ne peut être proposé car dépassant le taux d’usure ; mais aussi où la liquidité demandée n’est pas couverte par les offres bancaires.
Dans ce contexte, nous encourageons les emprunteurs à consulter très large, c’est-à-dire les banques dites classiques (Banque des Territoires, Banque Postale, Caisse d’Epargne, Crédit Agricole, Arkéa notamment) mais aussi les investisseurs via les brokers ainsi que les plates-formes de financement. Ainsi une mise en concurrence très large doit permettre de réussir à couvrir le besoin mais aussi à optimiser les conditions proposées. Les seuils minimums baissent donc et chaque consultation doit élargir le champ des demandes.
Ci-dessous, les conditions moyennes proposées dernièrement : sur 15 ans taux fixe moyen de 2,58% et marge moyenne sur Euribor de 0,63%, sur 20 ans taux fixe moyen de 2,60% et marge moyenne sur Euribor de 0,68%.
Le « tout taux fixe » qui se justifiait (après une analyse précise de l’encours existant car si l’EPS possédait déjà quasiment 100% de son encours existant en taux fixe il fallait s’interroger sur une diversification) ces dernières années doit s’adapter désormais au contexte de marché. L’histoire des 10 dernières années du financement du secteur public avec notamment les prêts dits toxiques a laissé des traces : beaucoup d’emprunteurs ont du mal à souscrire des prêts sur un index autre que le taux fixe. Une réflexion est nécessaire pour répondre à ces craintes, car dans le contexte actuel de remontée des taux, avec des projets Ségur à financer et dont les coûts de construction explosent avec le prix des matières premières, un taux fixe avec marge à 3% n’est pas toujours absorbable facilement sur le résultat d’exploitation des exercices futurs !!!
Voici quelques réflexions qui nous paraissent importantes voir primordiales :
- Sur un prêt de 20 ans, environ 45% des intérêts seront payés durant les 5 premières années,
- Un taux fixe moyen proposé aux EPS cote actuellement à 2,60%, l’Euribor 3 mois + marge de 0,80% (équivalente à la marge sur le taux fixe moyen) cote actuellement à 1,13%,
- L’Euribor 3 mois est un taux variable, mais est généralement plus souple qu’un taux fixe en terme d’indemnités : indemnité actuarielle pour un taux fixe, indemnité forfaitaire pour un taux variable. Le taux variable apporte donc de la souplesse en cas de restructuration de la dette,
- Des formules mixtes, taux fixe pendant quelques années et taux variable ensuite ou vice-versa existent et doivent être demandées aux banques afin de mesurer l’intérêt de se positionner sur une partie plus courte de la courbe des taux au moment où les frais financiers sont les plus importants.
Nous ne sommes pas en train d’écrire qu’il faut désormais emprunter absolument en taux variable, mais dans le contexte actuel cette solution doit être envisagée selon la structure actuelle de votre encours, et dans une solution globale de financement permettant une position d’attente : en effet dans les contrats en taux variable il y a généralement une option de passage en taux fixe qui pourra être regardée durant la vie du prêt au moment où les taux seront plus favorables (ne pas oublier également le swap qui a l’avantage de l’indemnité de marché).
Souvenons nous des années 2011-2012 sur certains propositions : à ce moment là il y avait le choix entre des taux fixes supérieurs à 5% et des taux variables avec une marge élevée à 2-3 % : les emprunteurs ayant choisies la « sécurité » en taux fixe « trainent » dans leurs encours ces lignes de prêts, alors que ceux ayant choisis le taux variable l’ont très facilement renégocié soit en taux fixe bas soit avec une marge à la baisse.
Le mot d’ordre actuellement pourrait donc être le suivant : analysez très précisément la structure de votre encours de dette avant de lancer votre consultation, afin d’avoir une idée précise sur vos marges de manœuvres en terme de répartition d’encours et ainsi saisir des opportunités qu’elles soient en taux fixes ou en taux variables afin d’optimiser votre financement dans un contexte budgétaire complexe et propre à chaque établissement.
Dernier point de vigilance et un peu de théorie
Faisons un zoom sur les produits structurés restants dans les encours des EPS sur risque de pente. Ces produits reposent sur le fait que l’EPS paye un taux bonifié tant que la logique prédomine c’est-à-dire que les taux longs sont supérieurs aux taux courts ; sinon le taux est dégradé.
Actuellement les écarts sont réduits : 0,399% sur CMS10-CM2, 0,574% sur CMS30-CMS1, 0,267% sur CMS30-CMS2 ; les anticipations prévoient une inversion en 2024-2025 mais la courbe US est de son côté déjà inversée depuis mars 2022.
Que signifie une courbe inversée ?
Les rendements à court terme, qui sont sensibles aux taux d’intérêt, augmentent avec les attentes de hausse des taux, tandis que la hausse des taux à long terme reflète les inquiétudes quant à l’incapacité des Banques Centrales à contrôler l’inflation. L’inversion signale qu’une récession pourrait suivre.
Par exemple, la courbe américaine s’est inversée avant chaque récession depuis 1955, une récession suivant entre 6 et 24 mois. Avant mars 2022, la dernière fois que la partie 2ans/10ans de la courbe des taux US s’est inversée, c’était en 2019. L’année suivante, les Etats-Unis sont entrés en récession, mais cette récession plutôt spécifique a été causée par la pandémie mondiale.
En Zone Euro, depuis 2000, la courbe s’est seulement inversée une fois en avril 2008 durant 6 mois pendant la crise des subprimes.
Pourquoi une inversion des taux maintenant ?
Les rendements de la dette publique américaine à court terme ont augmenté rapidement cette année, reflétant les attentes d’une série de hausses de taux par la Fed. Les rendements des obligations d’État à plus long terme ont évolué à un rythme plus lent, car on craint que le resserrement des politiques ne nuise à l’économie. En conséquence, la forme de la courbe de rendement du Trésor s’est généralement aplatie et, dans certains cas, inversée. Sachant que la FED a quelques mois d’avance sur la BCE mais que l’analyse actuelle est strictement identique, alors le risque existe d’une inversion de la courbe des taux en Europe.
Que faire sur les produits structurés sur écarts de CMS ?
A ce stade dans ce moment si volatil pour les taux et très incertain à prévoir avec le menu inflation-récession, il ne faut pas réagir dans l’urgence (et l’histoire des produits structurés nous l’a montré) car sécuriser impliquera une augmentation de l’endettement avec le refinancement de tout ou partie de l’indemnité, et dans le contexte actuel ce n’est peut-être pas la meilleure solution.
Il faut surveiller ces produits, si une inversion se produit elle ne sera peut-être comme toujours historiquement que temporaire, et il parait plutôt cohérent d’informer les tutelles de ce potentiel risque lors de la construction de l’EPRD 2023.