Premier président de la Commission européenne à honorer de sa présence le Congrès des maires, Jean-Claude Juncker a annoncé, le 31 mai, que les autorités en charge de son Plan d’investissement stratégique de 315 millions d’euros allaient davantage s’intéresser aux projets portés par les élus locaux.
Jean-Claude Juncker était attendu au tournant par certains élus locaux présents au Salon des maires et des collectivités locales, qui se tient jusqu’au 2 juin. À peine a-t-on posé un pied sur les tapis roulants du Parc des expositions de la Porte de Versailles – qui ne roulent pas, mais protègent de la pluie – qu’on entend « Jean-Claude Juncker-Panama Paper, même combat ! ». Sans surprise, on se voit tendre un tract de l’Association nationale des élus communistes et républicains (ANECR), mais le ton est donné : si le gouvernement veut baisser la dotation des collectives locales, c’est la faute à l’Europe de Bruxelles et à sa politique d’austérité.
Autant dire que l’arrivée du président de la Commission européenne sur la scène du Grand auditorium du Congrès des Maires n’a pas été accueillie par des tonnerres d’applaudissements de la part des élus locaux. Pourtant, en vieux routard de la politique, l’ancien premier ministre luxembourgeois a su manier humour décalé (« Si je siffle un peu pendant le discours, ne m’en voulez pas, je me suis cassé une dent hier ») et « caressage » des édiles dans le sens du poil (« La précédente Commission européenne souhaitait une baisse du nombre de communes en France. Je pense que ce n’est pas du tout notre rôle ») pour désamorcer la crise. Avec une certaine autorité, il a aussi remis les points sur les « i » : « La Commission européenne ne s’est jamais immiscée dans le débat sur les dotations de l’État aux collectivités locales. »
Jean-Claude Juncker a aussi, et surtout, insisté sur les vertus de son Plan (ou fonds) d’investissement stratégique de 315 millions d’euros via l’appel au capital privé, pour des projets risqués, mais labellisés par la Commission et garantis partiellement par la Banque européenne d’investissement. Le président de la Commission a dressé un premier bilan positif de ce plan initié dès 2015 : « Cela fonctionne. En moins d’un an, 100 milliards d’euros ont déjà été mobilisés dans 26 pays à travers 64 projets. La France est exemplaire avec 15 projets d’infrastructure et d’innovation générant 8,2 milliards d’euros d’investissement. » Le dirigeant européen a particulièrement mis en valeur la convention signée en décembre 2015 sur l’efficacité énergétique des bâtiments résidentiels, qui représente 800 millions d’euros d’investissement. Au programme, 10 000 logements à Paris et 40 000 dans toute la France.
M. Juncker a toutefois reconnu que les petites communes et collectivités locales françaises n’avaient pas encore pu saisir toutes les opportunités présentées par le Plan d’investissement stratégique, davantage adapté aux projets d’envergure, en principe supérieur à 50 millions d’euros : « Tout n’est pas simple pour les petites communes, c’est pourquoi nous allons créer des plates-formes d’assistance technique à tous les niveaux ». Plus tôt, lors d’un point presse, le président de l’exécutif de l’UE avait précisé : « Je crois savoir que les petites collectivités ont du mal à accéder au Plan d’investissement stratégique. Les modalités de prêts de la BEI pourraient changer pour leur permettre de mieux y accéder. Le niveau de 50 millions d’euros n’est pas gravé dans le marbre. La BEI est prête à descendre en dessous sur des projets concrets. Mais encore faut-il que ces derniers fassent du sens, que ce soit des investissements qui, sans le plan, ne se seraient pas faits. Par exemple, on ne va pas construire une piscine ici, puis une autre plus tard là-bas. Il faut une démarche commune d’un ensemble de collectivités pour qu’en termes de croissance et d’emplois, cela fasse sens. » Jean-Claude Juncker a fini son discours sous des applaudissements polis, mais personne n’a sifflé. François Hollande s’en sortira-t-il mieux jeudi ?