Avant une semaine de pause, les sénateurs ont continué l’examen du projet de loi de Santé. Ils ont sans surprise rejeté l’amendement porté par le Gouvernement visant à réintroduire la généralisation du tiers payant. Sur les GHT, ils ont permis aux hôpitaux des armées d’en faire partie et repoussé la date de mise en œuvre au 1er juillet 2016.
Lors de la discussion, la ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes a rappelé que « le système de tiers payant qui sera déployé n’est pas l’extension de ce qui existe aujourd’hui mais la mise en place d’un système ad hoc. En effet, la généralisation du tiers payant impose que nous repensions l’ensemble de l’organisation et de la relation entre l’assurance maladie obligatoire et les organismes complémentaires. » L’aspect technique est l’un des arguments des opposants à la généralisation qui estiment qu’elle ajoutera du temps administratif et ralentira le paiement des médecins. Marisol Touraine a aussi dénoncé les « hypothèses fantaisistes » sur le coût supposé du tiers payant, rappelant que la volonté du Gouvernement est de mettre en place un « dispositif simple« .
En réponse, Alain Milon (Les Républicains, Vaucluse), co-rapporteur et président de la commission des affaires sociales du Sénat, a indiqué : « Nous ne sommes pas opposés au tiers payant en tant que tel. J’ai même envisagé un temps, avec les autres co-rapporteurs, de conserver dans le présent texte le dispositif élaboré par le Gouvernement, en le rendant facultatif. Toutefois, nous n’avons pas opté pour cette solution, dans la mesure où elle équivaudrait, dans les faits, au droit existant. En effet, le tiers payant est déjà possible. » Et d’interroger : « Les dépassements d’honoraires seront-ils traités dans le cadre du tiers payant généralisé, et si oui, comment ? » car « le présent texte ne répond pas à cette question« . Le Sénat a en revanche adopté l’amendement gouvernemental supprimant l’article 18 ter. Introduit en commission, il prévoyait le renouvellement automatique de l’aide à la complémentaire santé (ACS) pour les bénéficiaires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) et l’allocation aux adultes handicapés (AAH). En effet, le renouvellement pour les bénéficiaires de l’Aspa fait partie du projet de loi de l’adaptation de la société au vieillissement tandis que, pour les bénéficiaires de l’AAH, le renouvellement ne peut être automatique, les ressources étant susceptibles de varier d’une année sur l’autre.
Autre amendement gouvernemental adopté lors de la dernière discussion sénatoriale : la remise d’un document informant le patient hospitalisé du coût global de sa prise en charge. Dans ce texte, il est indiqué que le but de cette mesure est de s’inscrire dans une visée pédagogique « en vue de favoriser une meilleure compréhension citoyenne du coût d’un passage à l’hôpital pour l’assurance maladie obligatoire« . De son côté, l’article 26 bis, initialement supprimé par la commission des affaires sociales du Sénat, retrouve sa place dans le projet de loi via un amendement déposé, entre autres, par Yves Daudigny (Groupe socialiste, Aisne). Il prévoit l’élaboration d’un projet d’organisation de la prise en charge psychologique pour qu’elle soit considérée dans le cadre de l’élaboration ou de la modification des projets d’établissements. Les sénateurs ont aussi rétabli l’article 26 ter A qui associe les collectivités territoriales via leurs représentants dans la gouvernance des établissements (n° 759).
L’article 27 portant sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT) a été adopté avec quelques modifications. Ainsi, les hôpitaux des armées pourront être associés à l’élaboration du projet médical des groupements. En effet, « acteurs à part entière » du service public hospitalier, leur activité doit être prise en compte dans les projets médicaux partagés afin qu’ils « trouvent leur place dans l’offre de soins publique de territoire« . Pour autant, « il serait prématuré de déterminer exactement la nature des relations entre les hôpitaux des armées et les GHT« . Celles-ci seront définies dans l’ordonnance prévue par l’article 55.
Par ailleurs, l’introduction systématique des établissements de santé privés dans la gouvernance de ces groupements est supprimée. La gouvernance mixte les exposerait en effet à « un régime de gestion différent« . En ce qui concerne le projet médical partagé au sein des GHT, sa mise en place suppose l’organisation d’activité de soins et des équipes médicales, indique l’amendement du Gouvernement. Il est donc prévu d’accompagner ces évolutions par « la mise en œuvre d’une procédure claire et adaptée de candidature des personnels médicaux et pharmaceutiques exerçant dans les établissements parties à la convention du groupement« . Concrètement, une procédure de publicité des postes en première intention au sein des établissements du GHT sera instaurée pour permettre aux praticiens de déposer leur candidature. Enfin, la date de mise en œuvre de ces groupements, initialement prévue pour le 1er janvier 2016 est repoussée au 1er juillet 2016. Un temps supplémentaire pour permettre aux projets médicaux d’être élaborés avant toute conclusion de convention constitutive.